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Chernobyl de HBO : faits et fiction

Que s’est-il réellement passé à Tchernobyl ? À quels moments la série tire-t-elle droit dans le mille, et à quels moments passe-t-elle à côté de la réalité ? Nous démêlons pour vous les faits de la fiction.

Les émotions et l'état d'esprit sont montrés de manière très précise, tant au niveau du personnel que des autorités. Cependant, les aspects technologiques présentent des divergences, qui ne sont pas des mensonges, mais simplement de la fiction.

Oleksiy Breus, employé de la centrale nucléaire à Tchernobyl

La série limitée Chernobyl, qui raconte l’histoire de la catastrophe nucléaire de 1986, a obtenu le plus haut score IMDB jamais atteint par une série TV. Et à raison, car cette fiction basée sur un fait historique (l’accident dans la centrale nucléaire de Tchernobyl) est extrêmement bien réalisée. Le résultat est passionnant, nous tient en haleine et vaut certainement bien plus qu’un coup d’œil. Les costumes, les objets et même la lumière semblent venir tout droit de l’Ukraine des années 80, conférant à la série une sensation de réalisme que beaucoup ont commentée et encensée. Il faut savoir cependant que des fautes assez importantes s’y sont glissées et que nous allons ici tenter d’en corriger quelques-unes.

Bien que Chernobyl soit basée sur un fait historique important, il y a dans cette série, qui est après tout une œuvre de fiction, des éléments et des personnages qui ont été ajoutés pour plus d’effet dramatique et qui ne correspondent par conséquent pas à la réalité. Craig Mazin, créateur et scénariste de la série, l’admet lui-même dans ce podcast.

Oleksiy Breus a également posé un regard critique sur Chernobyl puisqu’il a vécu l’accident à Tchernobyl et ses conséquences immédiates de très près, en tant qu’employé de la centrale. De la série HBO, il a dit la chose suivante : « La catastrophe de Tchernobyl est dépeinte de manière très puissante, comme une catastrophe mondiale qui a absorbé un grand nombre de personnes. De plus, les émotions et l'état d'esprit de l'époque sont montrés de manière très précise, tant au niveau du personnel que des autorités. […] Cependant, les aspects technologiques présentent certaines divergences... qui ne sont peut-être pas exactement des mensonges, mais simplement de la fiction. »

Beaucoup de réalisme

Avant de continuer, il nous semble important de souligner le réalisme dont fait preuve la série en dépeignant les événements qui ont eu lieu dans les heures, jours et semaines qui ont suivi l’accident.

Selon Oleksiy Breus, la série capte particulièrement bien les effets de l’irradiation sur le corps humain. Dans les heures qui ont suivi l’explosion, il parlait avec Oleksandr Akimov et Leonid Tuptunov (respectivement chef d’équipe sur le réacteur No 4 et opérateur, tous deux ayant un rôle prépondérant dans la série).

Oleksiy Breus, employé de la centrale nucléaire à Tchernobyl :

« Ils n’avaient pas l’air bien, pour ne pas en dire plus. Il était clair qu'ils se sentaient malades. Ils étaient très pâles. Toptunov était littéralement devenu blanc (ndlr Akimov et Toptunov sont décédés dans les deux semaines du syndrome d’irradiation aigu (SIA)). J'ai vu d'autres collègues qui travaillaient cette nuit-là. Leur peau était d'un rouge vif. Ils sont morts plus tard à l'hôpital de Moscou. Quand j'ai fini mon service, ma peau était brune, comme si j'avais un vrai bronzage sur tout le corps. Les parties de mon corps non couvertes par les vêtements - comme les mains, le visage et le cou - étaient rouges. »

Fiction et réalité

Internet déborde d’articles qui analysent la série d’une façon ou d’une autre, ou qui pointent du doigt les libertés prises dans le scénario : est-ce que le personnage d’Ulana Khomyul a existé (non !), Valery Legasov était-il présent au procès (non plus !), et caetera. Mais le véritable personnage principal de la série, plus encore que les protagonistes qui apparaissent à l’image, est l’énergie nucléaire même, ainsi que la radioactivité.

Ce que nous voulons donc avant tout observer ici sont les faits concernant la radioactivité, la sûreté nucléaire et les effets néfastes de l’irradiation. Est-ce que les faits tels que présentés dans Chernobyl sont alignés avec la réalité de Tchernobyl ? On démêle pour vous les faits de la fiction en répondant à 11 questions :

  1. L’irradiation provoque-t-elle des saignements ?
  2. Est-ce que la radioactivité fonctionne vraiment comme une balle de revolver ?
  3. Est-ce que le rayonnement peut interférer avec le pilotage d’un hélicoptère ?
  4. Les habitants de Pripiat sont-ils décédés du syndrome d’irradiation aigu ?
  5. L’irradiation a-t-elle eu un impact sur les grossesses ?
  6. L’irradiation est-elle contagieuse ?
  7. Les réacteurs sont-ils comparables aux armes nucléaires ?
  8. Les équipes de nettoyage ont-elles souffert de cancer suite à l’exposition à la radiation ?
  9. Les scientifiques étaient-ils vraiment les héros de l’accident de Tchernobyl ?
  10. Quel est le coût de l’angoisse ?
  11. Combien de personnes sont décédés à cause de l’accident de Tchernobyl ?
© HBO

1. L’irradiation provoque-t-elle des saignements ?

L’exposition au rayonnement nucléaire externe ne provoque pas de saignements de la peau. Dans la série, Aleksandr Yuvchenko – l’homme qui ouvre la porte de la salle du réacteur – a des taches sur le corps qui commencent à saigner à profusion. Après avoir étudié Tchernobyl, les chercheurs de l’Organisation Mondiale de la Santé ont appris que l’irradiation ne provoque pas ceci. Si Yuvchenko saignait dans la réalité, cela aurait pu être dû à des brûlures thermiques, des brûlures de vapeur ou par contact avec la porte en métal, elle-même brûlante. Par contre, le syndrome d’irradiation aigu peut provoquer des hémorragies dans le corps, tout comme la radiothérapie (une source interne de rayonnement).

Dans Chernobyl, les victimes exposées à de fortes doses de radiation ressemblent physiquement quelque peu à des zombies. Ceci ne colle pas non plus à la réalité, puisque la peau ne se décolle pas après avoir été irradiée. Ce qui se passe réellement c’est une accumulation de liquide extracellulaire dans les tissus, comme la réaction de notre peau à une piqûre de moustique, d’ortie ou de chardon. Pas de look de zombie, donc, même si cela va de pair avec de fortes nausées et une douleur intense.

2. Est-ce que la radioactivité fonctionne vraiment comme une balle de revolver ?

La radioactivité est-elle réellement comme une balle ? Oui et non. Oui, car certaines particules (comme les neutrons) volent par milliards à travers nos corps. Mais non, car cela ne provoque aucun dommage. La radioactivité qui traverse nos corps au jour le jour ne détruit pas tout sur son passage. Si c’était le cas, nous serions tous décédés il y a bien longtemps car nous sommes constamment sous le feu de « balles » de radiation qui touchent la terre en provenance de l’espace, soit le rayonnement cosmique. Plus d’informations sur la radioactivité et son fonctionnement.

Chaque atome d'U235 est comme une balle de révolver. Il se déplace presque à la vitesse de la lumière et traverse tout sur son passage, le bois, le métal, le béton, la chair…

Valery Legasov, dans la série Chernobyl
© HBO

3. Est-ce que le rayonnement peut interférer avec le pilotage d’un hélicoptère ?

La scène dramatique de la série HBO dans laquelle un hélicoptère s'écrase en essayant de survoler le réacteur – apparemment à cause de l'intensité des radiations – n'a jamais eu lieu.

Un crash d’hélicoptère a bel et bien eu lieu à Tchernobyl, mais c’était en octobre 1986, six mois après l’accident nucléaire et bien après la fin de la lutte contre l’incendie. Ce crash a été causé un câble ou la chaîne d’une des grues utilisées pour construire le sarcophage autour du réacteur touché. Ce câble ou cette chaîne se serait emmêlée dans les hélices de l’hélicoptère, le rendant impossible à piloter.

Cependant les images d’archives qui montrent le crash de cet hélicoptère en 1986 montrent qu’il y a un champ de radiation très intense au-dessus du réacteur, ce qui peut causer de l’électricité statique et des déformations dans les appareils de bord. De plus, des pilotes ont également rapporté éprouver le mal des rayons lorsqu’ils survolaient le réacteur. Il reste cependant que tout ceci n’a jamais causé d’accident d’hélicoptère dans les moments qui ont suivi l’accident.

© HBO

4. Les habitants de Pripiat sont-ils décédés du syndrome d’irradiation aigu (SIA) ?

Le retard impardonnable des autorités dans leur réaction, 36 heures après l’accident, a fait que les citoyens de Pripiat ont été exposés à des radiations. Il est dit dans la série que des gens observaient l’accident depuis un pont et que tous ces badauds sont morts du syndrome d’irradiation aigu (SIA).

Il n’y a pas de preuve tangible que de grands groupes observaient la centrale cette nuit-là (la majorité des gens dormait). Mais en moyenne, les habitants de Pripiat ont reçu une dose de 30 milliSievert (mSv), conséquence de l’avertissement tardif. Pour pouvoir mettre ce chiffre en perspective, il convient de dire que cette dose est plus ou moins équivalente aux radiations subies lors de trois scans CT du corps entier.

134 cas de SIA ont été confirmés parmi les membres du personnel de la centrale et les sapeurs-pompiers, mais aucun parmi la population de Pripiat. Seuls ceux à proximité immédiate du réacteur explosé ont effectivement développé le mal des rayons. Pour en arriver là, il faut avoir été exposé à une dose de 1 à 2 Sievert (Sv), soit 30 à 70 fois plus que ce à quoi a été exposée la population de Pripiat. Il faut également savoir que 80% des personnes qui ont souffert du SIA y ont survécu (mais cela veut malheureusement aussi dire que 19 personnes sont décédées des suites du SIA, entre 1986 et 2006). Toutes ces personnes qui se trouvaient selon la série sur le 'pont de mort' et seraient d’après elle décédées, ne le sont donc pas.

© HBO

5. L’irradiation a-t-elle eu un impact sur les grossesses ?

Dans une scène émotionnellement très chargée, on voit une femme enceinte rendre visite à son mari pompier souffrant du syndrome d’irradiation aigu (SIA). Ce fait est un fait historique avéré. Dans la série, cependant, il est dit que l’enfant a absorbé de si hautes doses de radiation venant de son père qu’il en est décédé par la suite. Or ceci est impossible. Les personnes exposées à un fort rayonnement radioactif ne deviennent pas à leur tour une source de rayonnement (pour plus de détails sur ce point, voir le point suivant, « L’irradiation est-elle contagieuse ? »).

Le personnage historique sur lequel est basé la femme enceinte du pompier existe bel et bien. Elle était bien enceinte lorsqu’elle est allée rendre visite à son mari et l’enfant est bien décédé quatre heures après sa naissance (insuffisances cardiaque et rénale). Il est possible que cela soit dû à l’exposition de la mère même à la radioactivité, mais l’Organisme Mondial de la Santé (OMS) n’a pas tranché à ce sujet. A titre informatif, cette même femme est de nouveau tombée enceinte trois ans plus tard. Les médecins lui avaient dit qu’il manquerait un bras à l’enfant, mais il est heureusement né en parfaite santé, avec ses deux bras. Cet enfant, maintenant un trentenaire, vit et travaille à Kiev.

Les études et rapports commandités par l’OMS après Tchernobyl n’ont rapporté aucune preuve tangible que les grossesses et accouchements aient été influencées par l’irradiation. De toute évidence, on trouve sur internet pléthore de photos (souvent photoshoppées) de bébés malformés (on vous met au défi de taper « malformation Tchernobyl » dans Google et de ne pas en trouver). Mais il faut savoir qu’il s’agit souvent de conséquences d’autres maladies, pour lesquelles l’accident de Tchernobyl est pointé du doigt à tort selon l’OMS.

© HBO

6. L’irradiation est-elle contagieuse ?

Contrairement à ce qui est suggéré dans la série, non, l’irradiation n’est pas contagieuse. « Sortez ! Sortez d’ici ! » crie l’infirmière à la mère enceinte, comme si chaque seconde qu’elle passait en présence de son mari souffrant du syndrome d’irradiation aigu (SIA) augmentait les doses de radiation qu’elle et son enfant subissait. En réalité, l’irradiation est internalisée par une personne touchée et elle ne devient pas à son tour un danger radioactif pour son entourage (à condition d’avoir pris une douche et d’avoir retiré les vêtements devenus radioactifs). Pour être tout à fait précis, le corps d’une personne atteinte du SIA présente effectivement des valeurs de radioactivité plus élevée, de façon à ce qu’un compteur Geiger montre une plus forte radioactivité dans l’environnement. Mais cette dose n’est pas suffisante pour avoir un impact sur des objets ou individus autres que la personne atteinte.

À un autre moment, dans Chernobyl, on voit une infirmière toucher un sapeur-pompier souffrant du SIA avec sa main, cette dernière devenant ensuite toute rouge. Ceci est impossible puisque, comme expliqué ci-dessus, la radioactivité ne se transmets pas. Elle est ici montrée, de façon erronée, comme une sorte d’infection toxique ou comme un virus qui se transmet de personne à personne dans un cycle de contagion. On le répète, ceci n’est pas possible dans la vie réelle.

La série pêche également par omission en ne précisant pas que les boîtiers en plastique placés autour des victimes n’avaient pas pour but de protéger leur entourage et les personnes se situant à l’extérieur de cette barrière. Le but de ces protections était de protéger les patients contre les infections du monde extérieur, puisque leur système immunitaire était gravement affaibli. D’une certaine façon, Lyudmilla était donc un plus grand danger pour son mari pompier Vasily que l’inverse. Simplement être présente dans cette pièce avec son mari n’était pas une menace ni pour elle ni pour leur enfant.

7. Les réacteurs sont-ils comparables aux armes nucléaires ?

La série Chernobyl suggère la peur d’une explosion nucléaire de 2 à 4 mégatonnes, cause directe de la fusion du réacteur et qui détruirait Kiev et rendrait une grande partie de l’Europe inhabitable. Cette peur est bien réelle, mais tout à fait injustifiée. Les centrales nucléaires n’explosent pas comme des bombes, et encore moins comme des bombes thermonucléaires aux capacités se chiffrant en mégatonnes.

Une explosion nucléaire des suites à l’entrée en fusion d’un réacteur a bel et bien eu lieu dans un autre accident nucléaire, celui de Fukushima au Japon, en 2011. Trois jours après la catastrophe, alors que la région avait été évacuée, un des réacteurs est entré en surchauffe. Puisque l’arrivée d’eau de refroidissement avait été endommagée, après cette surchauffe, il a explosé. Cette explosion a eu pour conséquence que les particules radioactives ont été disséminées sur un territoire plus vaste, mais cela n’a pas détruit Tokyo ni rendu le Japon inhabitable. Vous trouverez plus d’informations sur Fukushima dans ce dossier.

© HBO

8. Les équipes de nettoyage ont elles souffert de cancer suite à l’exposition à la radiation ?

La fin de la série suggère qu’il n’y a pas eu de recherche quant aux centaines de milliers de personnes qui ont nettoyé le site après l’accident, que ces personnes ont été abandonnées à leur sort et qu’il existe une grande incertitude quant à leur état de santé. La réalité est toute autre.

Ce groupe de personnes a été le sujet de beaucoup d’études, dont aucune n’a pu trancher avec certitude qu’il était proportionnellement parlant plus touché par le cancer. Une des études les plus complètes a été menée par les experts de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS, rattachée aux Nations Unies) et s’est déroulée sur les trente années qui ont suivi la catastrophe.

Les équipes de nettoyage ont probablement eu un risque accru de développer un cancer suite à la catastrophe nucléaire. Mais il faut savoir que ce risque est bien moindre l’augmentation des risques de cancer dûs aux problèmes de santé auxquels ils ont été confrontés – et le sont toujours jusqu’à aujourd’hui – tels que les maladies cardio-vasculaires, le tabagisme et la consommation excessive d’alcool. Les militaires chargés du nettoyage de Tchernobyl ont été confronté à des doses de radiations d’environ 120 milliSievert (mSv). C’est six fois plus que la dose annuelle maximale recommandée de 20 mSv. Mais en situation d’urgence, une dose annuelle de 240 mSv est admise. Une exposition telle augmente de 1% les risques de développer un cancer. A titre de comparaison, toute personne habitant en Europe de l’Ouest a 35 à 45% de risques de développer un cancer au cours de sa vie. Le tabagisme ajoute encore 10% de risques.

9. Les scientifiques étaient-ils vraiment les héros de l’accident de Tchernobyl ?

Les scientifiques semblent être les héros de la série Chernobyl. Il y avait bien des personnages héroïques dans l’après-Tchernobyl, dont des scientifiques. Mais la communauté scientifique soviétique et son fonctionnement politisé sont responsables tant des erreurs de conception du réacteur RMBK que de l’absence de culture de sécurité ou encore l’impardonnable manque de préparation du personnel. On peut donc dire que les scientifiques étaient, dans le cas de Tchernobyl, une partie du problème.

Pour en savoir plus sur les erreurs de conception des réacteurs de Tchernobyl et connaître les raisons pour lesquelles un accident de ce type ne saurait avoir lieu chez nous, vous pouvez lire notre dossier à ce sujet.

10. Quel est le coût de l’angoisse ?

L’angoisse causée par l’énergie nucléaire, la radioactivité et la contagion présumée a fait plus de victimes après l’accident que ce dernier. On ne peut pas voir la radioactivité, ni l’entendre ou la toucher, et des doses élevées sont néfastes pour la santé. Un tel « ennemi invisible » peut très facilement générer des sentiments d’angoisse, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. A tout ceci il faut également ajouter le stress psychologique causé par l’évacuation et le déménagement vers de nouvelles habitations. Environ 50.000 réfugiés de Tchernobyl sont décédés dans les décennies qui ont suivi d’alcoolisme, de maladies cardiaques et de suicide.

Les recherches sanitaires et épidémiologiques ont conclu que les effets à long terme sur la santé mentale ont causé bien plus de problèmes de santé et de décès que la radiation même.

11. Combien de personnes sont décédés à cause de l’accident de Tchernobyl ?

Selon le rapport des Nations Unies, 31 décès sont directement imputables à la catastrophe. Trois personnes sont décédées sur place et 28 autres dans les semaines qui ont suivi. Il est impossible de savoir précisément combien de civils sont morts d’un cancer spécifiquement causé par une (faible) exposition à la radiation dans le périmètre touché.

Chez les moins de 18 ans au moment de l’accident, il y a 20.000 cas documentés de cancer de la thyroïde – en partie dus à l’ingestion de lait contaminé à l’iode radioactif. Une étude récente (2017) des Nations Unies conclut que 25% des cas de cancer de la thyroïde peut être directement imputés à Tchernobyl, soit 5.000 cas. Sachant que ce cancer a un taux de mortalité d’environ 1% cela voudrait dire, en théorie, que 50 à 160 personnes seraient décédée (ou décèderont dans le futur) d’un cancer de la thyroïde causé par Tchernobyl.

Au total, les Nations Unies estiment que le nombre total de décès attendus liés à Tchernobyl et ses conséquences se situe entre 4.000 et 8.000 personnes. Chaque vie humaine à déplorer en est une de trop, mais l'énergie nucléaire reste donc une source d'électricité avec un faible taux de mortalité (par TWh produit) et un faible taux d'accidents par rapport aux autres secteurs et aux autres sources de production d'électricité. Pour mettre les choses en perspective, la catastrophe énergétique la plus grave est l'effondrement du barrage hydroélectrique de Banqiao en Chine, qui a fait 170.000 à 230.000 morts en 1975. Plus d'informations

Enfin, l'énergie nucléaire est une source d'énergie abondante mais surtout à faible teneur en CO2. Des études ont ainsi calculé que 1,84 million de décès dus à la pollution atmosphérique ont pu être évités jusqu'à présent grâce à l'utilisation de l'énergie nucléaire.

Conclusion

La série HBO Chernobyl est très bien réalisée, avec un haut niveau de réalisme à bien des égards. Mais d'un autre côté, nous voulons mettre en garde les téléspectateurs qui recherchent des informations factuelles : Chernobyl est une série de fiction, avec de nombreuses inexactitudes et des informations scientifiquement incorrectes.

Selon Oleksiy Breus, membre du personnel de la centrale de Tchernobyl et témoin clé de l'accident et de ses conséquences, l'accident de Tchernobyl – et la série qui le dépeint – montre très bien les failles substantielles du système soviétique qui l’ont rendu possible : « Par exemple, ce secret inutile, qui est devenu l'une des causes de la catastrophe de Tchernobyl ».

Craig Mazin, créateur et scénariste de la série Chernobyl :

« Les événements étaient si choquants et horribles que je ne pouvais pas rester impassible... mais sans vouloir franchir une ligne dans le sensationnel. Certaines personnes avaient des attentes vraiment stupides, croyant que la minisérie montrerait des bébés à trois têtes, répandrait des mensonges et dirait aux gens que l'énergie nucléaire est horrible. Non, ce n'est pas le cas ! Je suis en faveur de l'énergie nucléaire, car je pense qu'il est essentiel de lutter contre le changement climatique. Je veux que les gens comprennent exactement pourquoi la catastrophe de Tchernobyl s'est produite. Les Soviétiques ont augmenté le danger dans un réacteur instable de par sa conception, lorsqu'ils ont effectué un test de sûreté qui n'aurait pas dû être organisé. Parce que le nucléaire est si essentiel à notre avenir, je pense qu'il est vraiment important de le traiter avec soin et respect, car il peut être dévastateur. »

L’accident de Tchernobyl n’aurait jamais dû avoir lieu. Avec une meilleure conception du réacteur, une meilleure culture de la sécurité (avec laquelle cette expérience inutile n’aurait jamais été réalisée) et un régime démocratique plus ouvert (au sein duquel les voix critiques ne sont pas tue et où ne règne pas la loi du secret), cet accident aurait pu être évité. Le secteur nucléaire a appris des fautes commises à Three Mile Island, Tchernobyl et Fukushima et tiré des leçons importantes afin d’encore renforcer la sûreté des centrales grâce à un procédé d’optimalisations en continu. L’une de ces améliorations est l’obligation de transparence après un incident ou un accident. Les opérateurs nucléaires sont obligés, en tout temps, de partager incidents et accidents avec les autorités et le monde extérieur.

La série n'était pas une polémique antinucléaire. C'est une production antisoviétique, anti-mensonge, et prohumain. Mais ceux qui pensent que l'objectif était de montrer que l'énergie nucléaire est mauvaise, viennent de passer à côté du sujet.

Craig Mazin, créateur et scénariste de la série Chernobyl

Mais lorsqu’il s’agit de penser aux conséquences, il ne faut pas oublier qu’outre les vies perdues lors de l’accident de Tchernobyl, ce dernier a également eu de lourdes conséquences sociales, psychologiques et économiques. L’un des effets a également été de pousser le débat sur le nucléaire dans une direction plutôt négative, ce qui va jusqu’au jour d’aujourd’hui à l’encontre d’un débat objectif et équilibré.

Il faut savoir que quelle que soit l’ampleur d’un accident nucléaire, ils sont très rares et ont occasionné moins de décès que toute autre forme de production d’électricité.

Nous espérons que cette série rouvre en quelques sortes le débat sur l’énergie nucléaire en poussant le public à s’informer à son sujet. En ces temps où nous devons prendre des décisions importantes en ce qui concerne le futur énergétique de notre pays, un débat rationnel pesant le pour et le contre de chaque source d’énergie est plus que le bienvenu.

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