Quels sont les éléments de l'accord de coalition ayant un impact sur le secteur nucléaire ?
Le 1er octobre 2020, près de 500 jours après les élections fédérales, le nouveau gouvernement belge a prêté serment. La coalition, composée de libéraux (MR et Open VLD), de socialistes (PS et sp.a), de verts (Ecolo et Groen) et de chrétiens-démocrates (CD&V), a en outre inclus des éléments importants dans son accord qui pourraient avoir des conséquences profondes pour le secteur nucléaire belge. Un aperçu.
Une sortie nucléaire complète en 2025 (ou pas ?)
La décision la plus importante et la plus profonde du nouveau gouvernement : la sortie du nucléaire. Dans l'accord de coalition actuel, la coalition Vivaldi confirme la Loi de sortie du nucléaire de 2003. Cette loi stipule que tous les réacteurs nucléaires belges doivent s'arrêter après 40 ans de service. Les 3 plus anciens réacteurs (Tihange 1, Doel 1 et 2, en bref T1, D1, D2), qui auraient dû fermer en 2015, ont reçu le feu vert sous le gouvernement de Di Rupo 1 et Michel 1 pour rester ouverts 10 ans de plus afin de garantir la sécurité d'approvisionnement. En raison du LTO (prolongation de la durée d’exploitation) de T1, D1 et D2, les 7 réacteurs nucléaires fermeront d'ici 2025.

Les 7 réacteurs nucléaires produisent ensemble environ la moitié de toute l'électricité belge. L'énergie nucléaire est également la principale source d'électricité bas carbone dans notre pays. La capacité de remplacement (principalement les centrales au gaz et les importations via les interconnexions) n'existe pas encore en suffisance. Le gouvernement veut encourager de nouveaux investissements dans les centrales au gaz grâce à un mécanisme CRM (Mécanisme de Rémunération de Capacité). Le dossier est actuellement sur la table de la Commission européenne, où il est en attente d'approbation. L'UE examine si le mécanisme CRM n'est pas une aide d'État (cachée).
Ça ne dit pas tout. Le gouvernement belge garde une échappatoire pour maintenir plus longtemps ouverte la capacité nucléaire de 2 GW (concrètement, cela concernerait deux des réacteurs les plus jeunes et les plus efficaces, Tihange 3 et Doel 4). La décision à ce sujet serait prise à la fin de 2021, quand il y aura plus de clarté sur le dossier CRM et la date limite pour construire la capacité de remplacement à temps.
« Ce report accroît le risque de problèmes de sécurité d'approvisionnement et d'augmentation de la facture pour les entreprises. Notre dépendance énergétique par rapport à des sources étrangères et/ou incertaines risque encore de s’amplifier. »
Fédération des Entreprises de Belgique (FEB)
Les organisations d'employeurs (FEB, VOKA) regrettent cette décision. En ne prenant la décision qu'en 2021, le gouvernement belge crée un climat d'incertitude. « Ce report accroît le risque de problèmes de sécurité d'approvisionnement et d'augmentation de la facture pour les entreprises. En outre, notre dépendance énergétique par rapport à des sources étrangères et/ou incertaines risque encore de s’amplifier. », a ajouté la FEB.
Les centrales nucléaires belges emploient 7 000 personnes (dont 2 000 directes et 5 000 indirectes / en sous-traitance).

Savoir-faire nucléaire
Le nouveau gouvernement reconnaît l’excellence du savoir-faire nucléaire belge et le rôle de premier plan joué par les institutions nucléaires belges (SCK CEN et IRE notamment). Le gouvernement confirme donc son soutien continu à ces institutions et encourage la poursuite de la collaboration entre les institutions de recherche (médecine nucléaire, production de radio-isotopes médicaux, recherche fondamentale en physique nucléaire).
Il améliorera également encore la gestion des institutions de recherche nucléaire et préparera un dossier pour la décision de la deuxième et troisième phase de MYRRHA (sur la base d'un audit indépendant de la Cour des comptes et d'un groupe multidisciplinaire d'experts internationaux). Une contribution financière internationale substantielle devra être connue lors de la prise de décision.

Vers une décision politique sur les déchets nucléaires
Comme tout autre secteur industriel, le secteur nucléaire produit des déchets. En tant qu'acteur responsable, la filière prend sa responsabilité dans la gestion de ses déchets. De cette manière, 0% des déchets aboutissent dans la biosphère. Le secteur travaille également sur des solutions pour réduire drastiquement le volume et la durée de vie de ces déchets grâce à de nombreuses innovations.
Concernant les déchets hautement radioactifs et/ou à vie longue, le secteur demande depuis longtemps au monde politique de prendre une décision claire et ferme afin de pouvoir mettre en place les préparatifs nécessaires.
Le nouveau gouvernement s'est engagé à adopter des politiques nationales pour la gestion à long terme de ces déchets à travers un processus participatif (par exemple un panel de citoyens). Une fois ces politiques nationales adoptées, le gouvernement prendra des initiatives législatives qui permettront, par exemple, en cas d'alternative valable, de revenir aux décisions de gestion à long terme, ainsi que les modalités de récupérations des déchets (qui devraient permettre de reprendre les déchets enfouis pendant une certaine période).
Provisions nucléaires
Ce gouvernement renforcera le cadre juridique de sauvegarde des provisions nucléaires. De plus, une taskforce sera créée afin d’examiner comment la continuité du financement de la politique des déchets peut être assurée ainsi que de faire des propositions de modification de la législation à cet égard.
Découvrez le texte intégral de l'accord de coalition.